27. mars 2025

Ménopause au travail : parler ouvertement de la santé à la quarantaine

La ménopause est une phase normale de la vie et pourtant, elle entraîne des changements notables chez de nombreuses femmes. Environ 75 % d’entre elles éprouvent des symptômes tels que des bouffées de chaleur, des troubles du sommeil et elles doivent surmonter des défis cognitifs et émotionnels, à des degrés variables. Ces problèmes affectent non seulement leur bien-être personnel, mais aussi leur performance au travail, leur productivité et leurs choix en matière de carrière. Les hommes peuvent également expérimenter des changements hormonaux au milieu de leur vie. Ils se manifestent souvent par une perte de motivation, des problèmes de sommeil ou des sautes d’humeur. Ce phénomène est appelé ménopause masculine ou andropause.

Ménopause masculine ou andropause

Les hommes subissent également des changements hormonaux avec l’âge, mais ils se manifestent différemment de la ménopause féminine. Par conséquent, l’existence réelle de l’andropause reste controversée dans le monde scientifique.

Les hommes reconnaissent leur ménopause à divers changements psychologiques et physiques. Ils rencontrent fréquemment des problèmes de concentration, une sensibilité accrue au stress, des sautes d’humeur et une perte de motivation. Le désir sexuel peut également diminuer, parfois accompagné de troubles de l’érection. Les symptômes physiques tels qu’une augmentation de la transpiration, des bouffées de chaleur, des douleurs articulaires et une fonte  musculaire associée à une augmentation du taux de graisse corporelle sont également typiques de l’andropause.

La ménopause est souvent un sujet tabou, en particulier dans le monde du travail. En raison du manque de communication et de soutien, les femmes hésitent à parler de leurs expériences et ne reçoivent donc pas le soutien approprié. Les personnes touchées par la ménopause souffrent souvent en silence. Cela conduit non seulement à l’isolement, mais aussi au fait que les femmes préfèrent souvent réduire leur temps de travail, voire même démissionner (25 % des femmes, selon une étude réalisée en Angleterre en 2021). La périménopause commence souvent au moment crucial où les femmes essaient de progresser dans leur carrière, tout en faisant face à des symptômes pénibles.

Ménopause chez la femme

La préménopause commence généralement vers l’âge de 40 ans, lorsque la production des hormones sexuelles, notamment la progestérone, diminue. Les femmes remarquent souvent des changements dans leur cycle menstruel, des sensations d’inconfort, une rétention d’eau, une irritabilité accrue et des douleurs articulaires.

La ménopause est le moment des dernières règles, après lequel il n’y a plus de saignements pendant au moins douze mois. Elle survient en moyenne à l’âge de 51 ans dans les pays germanophones.

La périménopause comprend les années qui précèdent et l’année qui suit la ménopause, au cours desquelles des variations hormonales naturelles se produisent. Le cycle menstruel devient plus irrégulier et des symptômes psycho-végétatifs tels qu’états dépressifs, anxiété et fatigue peuvent apparaître. La production d’œstrogènes diminue également, ce qui peut entraîner des bouffées de chaleur et une prise de poids, aggravées par la baisse du taux de testostérone.

Les démissions dues à la ménopause coûtent cher

L’impact économique de la ménopause sur les entreprises est considérable. Le coût du remplacement d’une employée « perdue » s’élève à environ la moitié de son salaire annuel, si ce n’est plus. Rien qu’en Suisse, les dépenses liées aux démissions des femmes pendant leur (péri)ménopause s’élèvent à plus de 2 milliards de francs suisses.

Les entreprises britanniques l’ont aujourd’hui compris : 30 % des entreprises anglaises ont déjà mis en place des mesures de soutien pour les femmes ménopausées. Elles organisent des activités d’information, forment les cadres à ce sujet, soutiennent les femmes avec des horaires de travail plus flexibles ou proposent des vêtements de travail respirants.

Source: Hochschule für Wirtschaft und Recht, Berlin

Stigmatisation et manque de compréhension

Les femmes ménopausées sont souvent stigmatisées parce que leurs symptômes sont considérés comme des signes naturels du vieillissement. Mais les changements hormonaux peuvent affaiblir le système immunitaire, ce qui entraîne une augmentation de l’absentéisme et renforce l’impression qu’elles ne sont pas assez résistantes au travail. Dans le même temps, les femmes ménopausées reçoivent souvent des conseils médicaux généraux plutôt que des diagnostics précis. En particulier, le symptôme de la prise de poids est souvent attribué à l’inactivité et la sédentarité, sans tenir compte des causes hormonales et métaboliques. Malgré l’existence d’une formation médicale sur les modifications du métabolisme pendant la ménopause, il y a un manque d’éducation sur le sujet et d’approches différenciées, de sorte que les personnes concernées sont réduites à des représentations stéréotypées.

Absentéisme, présentéisme et « leave-isme »

Les aspects suivants montrent clairement que la ménopause entraîne non seulement des défis physiques et émotionnels, mais qu’elle remet également en question les modèles de travail existants.

L’absentéisme se manifeste par une augmentation des absences imprévues, mais souvent sans arrêt maladie officiel, car de nombreuses femmes ne donnent pas leurs symptômes comme la cause de leur maladie.

Le présentéisme signifie que les employées se rendent au travail malgré des problèmes de santé. Cela démontre leur engagement mais peut augmenter leur taux d’erreur. Lisez également notre article de blog qui traite du « présentéisme ».

Le leave-isme décrit l’utilisation d’horaires flexibles, de vacances ou de jours de congé pour récupérer d’une maladie sans présenter de déclaration de maladie.

Exemple de cas : diagnostics erronés et errance diagnostique avant le bon traitement

Une employée se démarque dans l’entreprise par son humeur morose, sa participation en baisse et son apparence malade et négligée. En raison de ces changements, elle est adressée au service social de l’entreprise Proitera.

Lors de l’entretien, elle décrit des symptômes tels que l’épuisement, le manque de motivation, la fatigue et la perte d’appétit – malgré une prise de poids. De plus, elle souffre souvent de douleurs articulaires. Sa gynécologue considère ces symptômes comme des effets secondaires typiques de la ménopause. L’hormonothérapie substitutive n’est pas recommandée dans son cas, car cela ne ferait qu’empirer les symptômes. L’employée accepte cet avis médical et pense qu’elle doit endurer ses « souffrances ».

Sur les conseils de sa fille, elle consulte un rhumatologue mais celui-ci pose un diagnostic erroné et l’adresse ensuite à d’autres spécialistes. Une errance diagnostique pénible commence : passant de spécialistes en spécialistes, la femme reçoit toujours des explications différentes, mais aucune ne se traduit par un traitement efficace.

Ce n’est qu’en écoutant le podcast d’une gynécologue qui conseille de toujours chercher un deuxième avis, qu’elle se motive à consulter une nouvelle médecin. Cette dernière finit par identifier un déséquilibre hormonal comme la cause de ses symptômes. Son état s’améliore considérablement grâce au traitement ciblé prescrit.

Parallèlement, un dialogue sur la situation est engagé avec la conseillère sociale de l’entreprise. Des aménagements des conditions de travail sont discutés avec son responsable afin de soulager l’employée pendant cette période difficile. Des horaires de travail flexibles et une charge de travail réduite lui permettent de continuer à travailler jusqu’à ce que le traitement fasse pleinement effet.

Le cas ci-dessus montre que les symptômes tels que l’épuisement, les problèmes de sommeil ou les troubles de la concentration sont souvent mal interprétés, par les personnes concernées elles-mêmes, mais aussi par le corps médical. Il en résulte des diagnostics erronés tels que l’épuisement professionnel ou la dépression, des thérapies inutiles et des absences au travail. Une meilleure compréhension peut éviter les erreurs d’interprétation et favoriser la mise en œuvre d’un soutien ciblé.

Ménopause au travail : une question de culture d’entreprise

Souvent, le problème ne réside pas seulement dans le manque de connaissances, mais aussi dans la manière dont de nombreuses entreprises travaillent. Les modèles de travail hybrides et les structures axées sur l’efficacité laissent peu de place aux discussions personnelles. Lorsque les questions de santé sont peu évoquées dans l’entreprise, la sensibilisation au bien-être des salariés est insuffisante. Ce contexte rend encore plus difficile de parler des symptômes de la ménopause ou d’autres problèmes de santé. Il faut avoir un dialogue ouvert sur la santé, avec les  femmes et les hommes. Les hommes subissent également des changements avec l’âge. Par conséquent, la transformation et le bien-être à la quarantaine devraient être des sujets d’intérêt commun.

Ici, la participation des cadres est particulièrement recherchée : ils façonnent la culture d’entreprise et peuvent montrer l’exemple. Parler simplement des questions de santé indique qu’il est acceptable de s’exprimer à ce sujet. Il ne s’agit pas de programmes ou de formations spécifiques, mais d’une attitude générale qui favorise l’humanité et la bienveillance. Les entreprises qui encouragent une telle coopération, profitent d’employés en meilleure santé et plus motivés.

Fondamentalement, ce n’est pas nouveau : chaque entreprise a déjà mis en place des mesures de santé pour promouvoir le bien-être et prévenir les arrêts maladie. Cependant, les cadres doivent savoir que la ménopause s’accompagne de certains symptômes. Ce sujet offre une autre opportunité de soutenir les employés sur des sujets tels que la santé hormonale et le vieillissement en bonne santé.

Afin d’établir une culture d’entreprise dans laquelle la santé et le bien-être ont naturellement leur place, les mesures concrètes suivantes sont possibles :

1. Rôle modèle des cadres

Les cadres doivent montrer l’exemple et faire passer le message que la santé est un sujet légitime. Cela ne signifie pas qu’ils doivent partager des détails de leur vie privée, mais ils peuvent parler ouvertement du stress, de la récupération et du fait de prendre soin de soi-même.

2. Créer un espace d’échange informel

Le travail hybride et la communication numérique créent souvent de la distance. Les entreprises peuvent délibérément promouvoir des occasions d’échange en personne, par exemple avec des échanges réguliers entre les membres de l’équipe, tels que prendre des pauses-café ensemble, ou des réunions de groupe où des sujets de santé tels que le sommeil, le stress ou les changements hormonaux peuvent être discutés de manière informelle.

3. Ancrer l’orientation santé dans la culture d’entreprise

La santé ne devrait pas être un sujet spécial mais faire partie du travail quotidien. Cela implique de veiller à ce que les réunions ne se prolongent pas à l’excès et que les pauses soient acceptées et respectées. La performance n’est pas synonyme de disponibilité et de présence constantes.

4. Sensibilisation plutôt que formation

Au lieu de formations obligatoires, des actions de sensibilisation ciblées peuvent être mises en place, par exemple par une communication interne, des rapports d’expérience ou de brèves contributions d’experts. Ainsi, la santé est naturellement intégrée dans le travail quotidien sans apparaître comme un événement obligatoire.

5. Permettre la flexibilité

Si des problèmes de santé (que ce soit la ménopause, les migraines ou les troubles du sommeil) affectent le travail quotidien, il convient de trouver des solutions à bas seuil : des journées de télétravail, des horaires de travail flexibles ou simplement comprendre qu’une personne a besoin d’une pause sans avoir à se justifier.

6. Établir un langage d’ouverture

Il ne faut pas sous-estimer le pouvoir des mots. Au lieu de dire « C’est une affaire privée » ou « Maintenant, ressaisis-toi », les cadres et les équipes peuvent faire preuve de compréhension avec un langage positif : « Comment vas-tu ? », « Si tu as besoin d’aide, je suis là » ou encore : « Nous trouverons une solution. » Il n’est pas question que tout le monde parle de tout. Mais une culture d’entreprise dans laquelle les échanges sur les questions de santé vont de soi, élimine les incertitudes et empêche certaines personnes de quitter le monde du travail en raison de malentendus évitables.

7. Le service social d’entreprise comme élément de la culture d’entreprise

Une culture d’entreprise favorable à la santé a besoin de points de contact concrets. Le service social d’entreprise offre un soutien confidentiel en cas de stress et renforce les cadres dans la gestion des défis liés à la santé. Les entreprises qui l’intègrent activement envoient un signal : C’est bien de demander de l’aide – cela favorise le bien-être et prévient le surmenage.

 


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