La solitude dans le monde du travail: un sujet tabou
Ainsi, un tiers des Suisses éprouvent parfois ou souvent un sentiment de solitude. C’est justement pendant les fêtes que ce sentiment peut être particulièrement prononcé. Pour les personnes qui ont perdu leur environnement social, ces jours sont particulièrement difficiles. Mais même si l’on se trouve au milieu des invités d’une fête de famille ou d’entreprise, on peut ne pas se sentir à sa place et se sentir seul.
Chez les personnes qui ont immigré en Suisse, cette proportion est même plus élevée encore. Mais de plus en plus d’adolescents et de jeunes adultes se sentent eux aussi seuls. Selon l’Office fédéral de la statistique, la tendance est à la hausse depuis 2007. Et le dernier sondage à ce sujet remonte à 2017, c’est-à-dire à avant la pandémie de Covid-19. Pourtant, bien que tant de personnes soient touchées par la solitude dans notre pays, elles ont beaucoup trop honte pour en parler.
Celui qui est seul souffre. Celui qui souffre de manière chronique n’est pas heureux, et celui qui n’est pas heureux n’est pas seulement insatisfait, il est aussi moins performant, plus souvent malade et ne participe plus à une société de manière à ce que celle-ci puisse se développer sainement.
Qu’est-ce que la solitude ?
La solitude est une expérience subjective. Il s’agit la plupart du temps d’un sentiment de manque et d’absence de liens sociaux, du sentiment d’être transparent·e. La solitude ne signifie donc pas « être seul·e ». En effet, il est possible d’être seul·e sans ressentir de solitude ou de ressentir de la solitude même en étant entouré·e de gens.
Chaque personne éprouve de la solitude à certains moments de sa vie, que ce soit en raison de la perte d’un être cher suite à une séparation ou un décès, d’un déménagement ou d’un changement d’employeur. Dans ces situations, la solitude est même un important mécanisme de protection qui invite la personne à s’entourer à nouveau de gens et à chercher le contact avec d’autres personnes. La solitude devient dangereuse lorsque ce sentiment persiste, c’est-à-dire qu’il devient chronique.
En effet, la solitude chronique a des répercussions sur la santé qui peuvent aller jusqu’à la mort. Anne-Françoise Allaz, médecin, présente même la solitude comme un « serial killer à démasquer » dans un article.
Selon différentes études, la solitude est plus mortelle que l’obésité ou le tabagisme et elle peut entraîner des problèmes cardiovasculaires, des troubles du sommeil, des douleurs dans le dos et la nuque ou encore une dépression moyenne à sévère.
La solitude au travail
Ces dernières années, la question de la solitude dans le monde du travail a surtout été évoquée en lien avec la pandémie et la généralisation du télétravail. Pour autant, ce sentiment peut se manifester aussi bien dans un bureau individuel fermé que dans un bureau en open space partagé avec d’autres personnes. Dans cette configuration, les sentiments d’absence de reconnaissance ou de rejet peuvent être particulièrement marqués lors de réunions d’équipe. Ces sensations suscitent fréquemment un sentiment d’échec et ancrent ainsi davantage la honte qui va de pair avec la solitude. Les personnes concernées se replient de plus en plus sur elles, accentuant encore leur solitude. Un vrai cercle vicieux !
Les personnes qui doivent « simuler » pendant leur travail sont particulièrement à risque. Ceci concerne souvent les collaborateurs plus jeunes. Ils ont parfois du mal à ressentir de l’attachement pour leur employeur car leurs attentes et valeurs ne correspondant pas à celles d’autres générations ou à la culture de l’entreprise. Il en résulte un sentiment de solitude. Mais les membres de la communauté LGBTQIA+ ou de minorités ethniques peuvent eux aussi avoir du mal à se sentir inclus dans leur équipe. De même, il arrive souvent que les collaborateurs restés absents pendant longtemps en raison d’une maladie ou d’un accident et qui, au début de leur processus de réinsertion, ne peuvent pas, ou pas complètement, retrouver leur ancienne activité, leur ancien rôle ou leur ancienne équipe ne se sentent pas (ou plus) inclus et éprouvent de la solitude dans leur situation.
« Les dirigeants devraient montrer de l’estime pour leurs collaborateurs. Ceux qui se perçoivent comme des consommables risquent de s’isoler ».
Le sentiment de solitude n’épargne pas les cadres dirigeants
En effet, c’est souvent seuls que les cadres dirigeants doivent prendre des décisions difficiles. L’échelon de la direction est soumis à des pressions considérables qui peuvent entraîner un sentiment d’isolement chez les cadres. Non seulement ils sont responsables de l’entreprise, mais il arrive aussi qu’ils n’aient personne avec qui échanger au même niveau de responsabilité. Les inquiétudes, les incertitudes et le stress associés à ce rôle peuvent conduire à un sentiment de solitude. Cette forme d’isolement peut affecter non seulement la santé physique des cadres dirigeants, mais également leur capacité de décision et, à long terme, les performances de l’entreprise.
Comment sortir de la solitude
Absences pour raisons de santé, baisse des performances, manque de coopération, taux de fluctuation élevé…
La solitude coûte cher à une entreprise. C’est pourquoi il est conseillé de rompre le silence sur ce sujet tabou et de mettre en place des mesures adéquates pour lutter contre la solitude à tous les niveaux de la hiérarchie.
Nous avons résumé dans notre check-list quelques possibilités, pour les cadres dirigeants ou les responsables des ressources humaines, d’aider les collaborateurs de leur entreprise à trouver des moyens de sortir de la solitude.
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